La centrale d’achat : » la négociation à la française »
Chaque année, les rituels de la négociation en centrale d’achat de GMS et de RHF font toujours dire aux acteurs des box que « cette année, on n’a jamais vu ça … ». Ces mots recouvrent à la fois une réalité : celle de la « négociation à la française » que le monde ne nous envie pas. Cependant il énonçait, à travers une fraternité de combat dans ce rapport de force. Ce dernier nous mènerait vers un monde plus collaboratif entre la distribution et la production. Surtout dans ce moment où la croissance du chiffre d’affaires n’est plus le régulateur final des discussions annuelles sur le 3 ou 4 fois net.
2023 nous dit de nouvelles choses dans le rapport de force.
1/ La fracture entre la distribution et la production est officialisée sur la place publique à travers les hausses de tarifs stigmatisées par les enseignes de centrale d’achat. Ces enseignes réussissent leurs coups politiques et sociétales en embarquant le citoyen dans son combat contre la spéculation. Elle donne l’impression que le fournisseur comparait devant un « tribunal des box ».
2/ La fracture est également consommée entre les multinationales/grosses ETI et les PME sur la façon de remédier aux effets de la crise. Ceci se lit notamment dans les signataires de Pactes par les pouvoirs publics, les PME étant les « ballotés du droit ».
3/ La fracture est également là entre les gouvernants et le reste de la société civile sur le « réglage réglementaire ». Elle complète un Code du Commerce qui patine sur les réponses à apporter à la crise.
4/ L’industrie marque encore son retard de savoir-faire en communication. On peut le voir dans la multiplicité d’interventions des patrons, très faible comparé à celui d’un distributeur.
Les points de réflexions qui s’imposent aux directions générales et commerciales sont parmi beaucoup d’autres, les suivants :
1/ La distribution a réussi à se poser en « contrôleur de gestion » de l’industrie. Elle joue encore mieux que d’habitude le registre de la dramatisation des hausses tarifaires. Or : qui lui demande « pourquoi », et « de combien » elle augmente ses demandes de budgets, NIP et ce qu’elle coûte au fournisseur chaque année par le transfert de charge d’exploitation et de revente, via les Conditions d’achats ?
2/ Le temps de la négociation réglementaire est de + en + court et vide de contenu. C’est-à-dire sans visibilité de Chiffre d’affaires prévisionnel. Comment la Loi ou les CGV pourraient-elles instaurer ce facteur essentiel dans la construction du prix de revient industriel ? Elle pourrait, ainsi, ouvrir la porte à une négociation plus équilibrée ?
3/ Le monde de la production et transformation montre son retard de puissance de communication dans la société française. Il manque également de cohérence sectorielle dans la pédagogie. Comment pourrait-elle donner plus de relief et devenir un contrepouvoir à la médiatisation des enseignes ?
4/ A titre de conditions de travail, l’acheteur et le compte-clef sont soumis à des pressions organisationnelles et psychologiques internes. Les effets sont sans doute à être officialisés par les services de ressources humaines.
5/ Enfin, les vrais enjeux d’une négociation « normale » est toujours posé. Quelles contreparties la Grande Distribution propose-t-elle à un industriel pour créer de la valeur spécifique à chaque fournisseur pour lui permettre ainsi de réduire sa hausse de tarif ?
Gardons courage cependant sur le fait que ce rapport de force bouge au quotidien. La situation dans la centrale d’achat dans 6 mois reste encore à écrire.
Très belle année à toutes et à tous !